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Il y a 40 ans, le français devenait langue officielle des tribunaux ontariens |ONFR+|

ONFR+ – Rudy Chabannes, publié le 1er mai et mis à jour le 2 mai 2024

TORONTO – Le 1er mai 1984, la Loi sur les tribunaux judiciaires recevait la sanction royale, intronisant le français comme langue officielle des tribunaux ontariens, au même titre que l’anglais. 40 ans plus tard, dans la réalité, de nominations de juge unilingue en reports d’audience, les défis s’accumulent, faute de main-d’œuvre, de valorisation des postes administratifs et de volontarisme d’une partie de la profession.

La Loi sur les tribunaux judiciaires a gravé dans le marbre dès 1984 le bilinguisme des cours ontariennes. Montage ONFR

Si les justiciables franco-ontariens peuvent réclamer un juge bilingue, ou encore des audiences et documents en français, c’est essentiellement grâce à la Loi sur les tribunaux judiciaires. Adoptée en 1984 sous l’impulsion du procureur général Roy McMurtry, récemment décédé, cette loi a changé la donne en Ontario.

« Il a compris que c’était une question de justice et d’équité envers la minorité francophone de l’Ontario », mesure François Larocque, titulaire de la Chaire de recherche sur la francophonie canadienne en droits et enjeux linguistiques.

« Avant McMurtry, le français était une langue étrangère devant les tribunaux. Il n’y avait aucune reconnaissance particulière. Pour lui, c’était incompatible avec la dualité linguistique du Canada », décrypte Étienne Saint-Aubin, coordonnateur des services en français au ministère du Procureur général à cette époque. Ce dernier compare sans détour l’ancien système judiciaire à un « désert juridique au niveau du français ».

Pour François Larocque, Linda Cardinal et Étienne Saint-Aubin, la Loi sur les tribunaux judiciaires a changé la donne linguistique en Ontario. Gracieuseté

D’abord circonscrite aux régions désignées sous le gouvernement Davis, puis généralisée à l’ensemble de la province en 1986, sous le gouvernement Peterson, la Loi s’est appliquée à tâtons à ses débuts. « Il était impossible de prévoir une capacité bilingue dans toutes les régions mais on pouvait organiser des procès sur demande, se remémore Me Saint-Aubin. On a donc constitué des équipes volantes et muté certaines ressources dans les endroits en plus grande demande. »

Quelques années auparavant, de premiers balbutiements étaient certes apparus comme la traduction de lois en français, un projet-pilote de tribunal bilingue à Sudbury lancé en 1976 ou encore la fondation de l’Association des juristes franco-ontariens (AJEFO) en 1981.

« L’Ontario considérait alors qu’il avait un rôle à jouer dans la fédération, plus grand que celui de simplement s’occuper de son jardin »

— Linda Cardinal

« Robarts, Davis (premiers ministres) et McMurtry font partie d’une génération de gens qui s’est ouverte à la francophonie au moment où le nationalisme québécois battait son plein, avec un grand mouvement d’affirmation de l’identité francophone, mais aussi la commission d’enquête sur le bilinguisme et le biculturarisme », analyse la chercheuse Linda Cardinal, vice-rectrice adjointe à la recherche à l’Université de l’Ontario français.

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