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René Arseneault, le député libéral qui ne veut pas prêter serment au roi |RADIO-CANADA|

RADIO-CANADA – Rosanna Tiranti, publié le 14 avril 2024

Malgré l’échec de son projet de loi, le député acadien affirme qu’il n’a pas dit son dernier mot.

René Arseneault est député de Madawaska—Restigouche depuis 2015.
PHOTO : RADIO-CANADA / BENOIT ROUSSEL

Le député libéral René Arseneault n’a pas réussi à faire tourner la page du serment au roi dans le livre de la Chambre des communes, mais il refuse de s’avouer vaincu.

Dans les années 1990, le fier Acadien avait réussi un tour de force : être admis au barreau de sa province sans prêter serment à la reine Élisabeth II. Sa tentative d’imposer le même changement à la Chambre des communes a échoué.

Symbole d’humiliation et douloureux rappel de la déportation des Acadiens entre 1755 et 1764, le serment au souverain est un peu le cheval de bataille du député libéral Arseneault.

Cela me fait mal au plus profond de moi de devoir prêter un serment d’allégeance à un monarque dans un autre pays pour travailler dans l’intérêt supérieur de mon pays, indique le député de Madawaska—Restigouche en entrevue à l’émission Les coulisses du pouvoir.

L’entrevue de René Arseneault à l’émission « Les Coulisses du pouvoir » sera diffusée le dimanche 15 avril à 11 h sur ICI Télé et ICI RDI.
PHOTO : RADIO-CANADA / BENOIT ROUSSEL

René Arseneault avait beau s’être préparé à tous les scénarios, il ne cache pas sa déception.

Au-delà de son combat personnel contre un serment humiliant, sa proposition était, dit-il, une manière élégante et inclusive pour le gouvernement fédéral de s’adapter aux réalités d’un Parlement où siègent des députés de toutes les origines.

Le projet de loi de M. Arseneault aurait donné le choix aux élus fédéraux de prononcer le serment d’allégeance au souverain ou de prêter serment au nom de l’intérêt supérieur du Canada et dans le respect de sa Constitution.

Il affirme que des députés – même ouvertement monarchistes – ont appuyé sa démarche, parce qu’ils ont compris que le but du projet de loi n’était pas de se débarrasser du serment au roi, mais plutôt d’offrir un choix aux élus.

Mais le matin du vote, les espoirs de René Arseneault sont gravement déçus.

Le leader du gouvernement en Chambre, Steven MacKinnon, annonce que le gouvernement n’appuiera pas le projet de loi. Nous estimons, dit-il, que ce n’est pas le temps de proposer des modifications constitutionnelles au Canada.

Si les ministres se prononcent donc contre le projet C-347, le vote est libre pour le reste du caucus libéral. Mais la décision du gouvernement envoie tout de même un message.

Le projet de loi de René Arsenault est finalement défait, 197 votes contre 113.

Dans les années 1990, le fier Acadien avait réussi un tour de force : être admis au barreau de sa province sans prêter serment à la reine Élisabeth II.
PHOTO : RADIO-CANADA / BENOIT ROUSSEL

Au Québec, où le Parti québécois a mené avec succès une démarche semblable après la dernière élection, la déception est vive. On a laissé penser aux gens qu’il y aurait un vote libre, mais pas au sein du cabinet, dit le député péquiste des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau.

C’est lamentable […] que le gouvernement Trudeau ait manqué un rendez-vous avec l’Histoire comme celui-là, pour faire un pas vers la réconciliation avec les Acadiens de tout le pays. C’est absolument décevant, ajoute-t-il.

La Constitution canadienne comme prétexte?

L’argument constitutionnel brandi par le leader du gouvernement ne convainc pas René Arseneault, pas plus que l’argument selon lequel le serment au roi ne fait pas partie des priorités des Canadiens, comme l’ont affirmé plusieurs membres du gouvernement Trudeau.

Quand on [ne] veut pas faire quelque chose, il n’y a jamais de bon ni de mauvais moment.

Une citation de René Arseneault, député libéral de Madawaska—Restigouche

Le député acadien ajoute que s’il avait été adopté en seconde lecture, son projet de loi aurait pris le chemin du comité de la Justice, où les témoignages d’experts et de juristes auraient permis de dissiper certains préjugés concernant sa proposition.

L’argument constitutionnel ne convainc pas non plus le constitutionnaliste Patrick Taillon.

Il estime plutôt que le gouvernement libéral ressent un malaise quant au fond du projet de loi. L’argument juridique permet plutôt au gouvernement d’éviter le fond de la question, l’objection de conscience d’un député acadien qui porte la mémoire de la Déportation.

Il faudra donc encore attendre pour qu’Ottawa suive l’exemple de l’Assemblée nationale du Québec, où le Parti québécois a réussi à convaincre les députés de tous les partis d’abolir le serment au roi.

« Cela me fait mal au plus profond de moi de devoir prêter un serment d’allégeance à un monarque dans un autre pays pour travailler dans l’intérêt supérieur de mon pays », estime René Arseneault.
PHOTO : RADIO-CANADA / BENOIT ROUSSEL

René Arsenault ignore quelle sera la suite à Ottawa. Il pense qu’un gouvernement majoritaire aurait plus de chance de faire adopter une telle mesure et surtout, il refuse de s’avouer vaincu.

Ce n’est que partie remise, dit-il. La graine est plantée.

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