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En 10 ans, des entrepreneurs immigrants francophones ont investi près de 20M$ au Manitoba |RADIO-CANADA|

Prenez note que cet article ne fait plus l’objet de mise à jour et pourrait contenir des informations désuètes.

RADIO-CANADA – Thibault Jourdain, publié le 4 juin 2024

Dans les dix dernières années, 19,7 millions de dollars ont été investis dans la province par des immigrants francophones qui ont créé leurs entreprises, selon des chiffres compilés par le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba (CDEM).

Emmanuel Battaglia a lancé sa boulangerie A taste of France, à Winnipeg, il y a environ deux ans.
PHOTO : RADIO-CANADA / AMINE ELLATIFY

Le nombre d’immigrants qui choisissent de créer ou de racheter une entreprise est, par ailleurs, aussi en croissance. Seuls 15 immigrants avaient monté leur entreprise en 2014-2015, contre 45 en 2023-2024.

Directeur en appui aux entreprises au CDEM, Joel Lemoine estime qu’une partie de cette augmentation tient au fait que l’organisation mène plus de missions de recrutement à l’étranger. Je crois que c’est grâce à des initiatives comme Destination Canada ou Destination Manitoba, mentionne-t-il.

À titre d’exemple, le CDEM a mené deux missions en Afrique, en Côte d’Ivoire et au Cameroun, l’an dernier pour attirer des immigrants francophones.

Le record reste cependant 2021-2022, en pleine pandémie, où 65 personnes ont créé leur entreprise.

Je crois qu’il y a plusieurs de ces gens-là qui ont perdu leur emploi [et qui] avaient besoin d’une source de revenus. Ils étaient à la maison à réfléchir et ont décidé d’ouvrir des entreprises à domicile, avance Joel Lemoine.

Ces entrepreneurs-là sont toujours en affaires, ajoute-t-il, même si certains ont repris, parallèlement, leur emploi.

Plus d’investissements en région qu’en ville

Les investissements à l’extérieur de la capitale manitobaine totalisent 10 373 000 $ en 10 ans, contre 9 364  000 $ à Winnipeg. Les montants des sommes investies varient grandement d’une année à l’autre, mais généralement, celles en région rurale sont plus importantes.

Cela s’explique en partie par les coûts élevés pour se lancer en affaires dans le domaine agricole, notamment en raison des prix élevés de la machinerie et des terrains. Parfois, on a des agriculteurs qui viennent d’un autre pays et qui vont acheter un commerce ou une entreprise dans le domaine agricole, ou une ferme existante au rural. Les investissements et les coûts d’achats sont beaucoup plus élevés, développe Joel Lemoine.

Joel Lemoine est directeur en appui aux entreprises au CDEM.
PHOTO : RADIO-CANADA / THIBAULT JOURDAN

Il est cependant plus facile de démarrer une entreprise en milieu rural qu’à Winnipeg, surtout si elle est petite. On doit comprendre que les gens s’établissent dans le marché au rural aussi à cause des coûts. Ils sont parfois beaucoup moins élevés, relève le directeur en appui aux entreprises au CDEM.

Sans surprise, les villes et villages autour de la capitale manitobaine attirent l’essentiel des créations d’entreprises, mais des communautés comme Notre-Dame de Lourdes, Saint-Lazare, Saint-Georges ou encore Saint-Laurent voient, elles aussi, des entreprises lancées par des immigrants, assure Joel Lemoine.

Par ailleurs, des villes anglophones attirent aussi des entrepreneurs francophones. C’est notamment le cas de Niverville et Steinbach. J’ai eu quand même probablement quatre à cinq démarrages d’entreprises à Niverville et de plus en plus de démarrages à Steinbach où il y a maintenant une communauté d’Africains majoritairement originaires d’Afrique de l’Ouest [francophone NDLR], donne-t-il en exemple.

Plus de 600 emplois créés

La majorité des sociétés montées par des immigrants sont des petites entreprises (de un à 99 employés) et sont souvent opérées à domicile. Ce type compagnies représentait environ 98 % des près de 44 000 entreprises avec des employés au Manitoba en décembre 2023, selon des données du Bureau des statistiques du Manitoba.

Par ailleurs, leur variété est grande : il peut s’agir de commerces d’import-export, de consultations, mais aussi de vente de vêtements, bijoux, parfums…, énumère Joel Lemoine.

Ce genre d’entreprises n’embauchent pas forcément beaucoup de personnel, mais, en 10 ans, 665 emplois ont tout de même été créés par des immigrants francophones.

Je dirais que 90 % des emplois créés par nos clients sont à temps plein, et ça c’est quelque chose qu’on a à cœur, ajoute-t-il.

La réalité, c’est que j’ai jamais voulu avoir ma propre affaire

Il arrive tout de même que certains immigrants francophones créent plus d’emplois. Dans le passé, on a vu des nouveaux arrivants qui cherchaient à acheter un restaurant ou un commerce. Ça crée une dizaine, même une vingtaine d’emplois à temps partiel et à temps plein, mentionne Joel Lemoine.

C’est notamment le cas d’Emmanuel Battaglia, propriétaire depuis bientôt deux ans de la boulangerie A Taste of France, située à Transcona, dans l’est de Winnipeg. Pour l’instant, en m’incluant, j’ai sept personnes, dont trois à temps partiel, explique-t-il.

L’homme s’est retrouvé à la tête d’une entreprise un peu par hasard. La réalité c’est que j’ai jamais voulu avoir ma propre affaire, glisse-t-il. Mais des années de galère avec l’immigration et divers patrons de boulangerie à Winnipeg l’ont poussé à décider [qu’il] ne pouvait pas continuer à travailler pour des gens qui n’avaient pas les mêmes idées.

Son projet, qui lui a pris quatre ans à développer et coûté 135 000 $, est en croissance : ainsi, cet été, il a repris l’un des kiosques situés sur l’Esplanade Riel mais son grand projet serait d’ouvrir une vraie boulangerie française à Saint-Boniface afin d’être vraiment implanté dans la communauté.

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